Potosi

25/02/2013

On part de Sucre tranquillement apres le petit dejeuner, le temps de repasser a notre super patisserie francaise (oui, les gateaux au chocolat etaient trop bons!), puis on prend le bus pour Potosi. Route sauvage, montagnes desertiques, on retrouve un peu les couleurs de notre trek.
On arrive a Potosi, ville la plus haute du monde a 4060m d altitude, dans la journee, on va a l office de tourisme qui nous renseigne sur les hotels et les choses a faire et a visiter. On trouve un hotel, mange une pizza 4 fromages (enfin 3 car en panne de roquefort) puis on visite un peu le centre historique tres joli avant la tombee de la nuit  (les couleurs sont tres belles apres l orage, et les eglises sont plutot bien mises en valeur par l eclairage la nuit) et surtout avant (non, apres !) l orage enorme qu il y a quasi tous les soirs. Puis on se renseigne aupres des agences pour visiter la mine, car Potosi est reputee pour ses mines. Tres marrant, la dame de l agence, voyant qu on est medecin, nous demande des infos sur sa gastrite…

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26/02/2013

On a rendez vous a 9h pour la visite. On est avec 4 chiliens et un japonais et notre guide, ex mineur, Freddy (petite blague sur le fait qu il ne soit pas Freddy Mercury, mais Freddy Silver, car ce sont des mines d argent, et que notre agence, c est Silver Tours…). On commence par se changer (pantalon, veste, bottes, casque et lampe) puis on se ballade comme ca dans la rue (et oui, pas peur du ridicule!) pour aller au marche acheter des cadeaux pour les mineurs (c est la tradition). On a le choix entre des feuilles de coca que les mineurs chiquent toute la journee pour les stimuler et leur donner du courage (d apres notre guide, c est une chose ultra importante, et ca aiderait aussi a filtrer la poussiere qu ils respirent, car pas de protection et pas de masques, sauf pour ceux qui perforent…encore heureux!!), des refrescos (type coca cola), un catalyseur (pour augmenter l efficacite des feuilles de coca), des cigares, de la dynamite et nitrate d amonium, et de l alcool potable a 96 degres (et non je ne me suis pas trompee en ecrivant, c est bien 96 degres!, c est du whisky boliviano, comme dit notre guide, et ca se boit tous les vendredis, ou pour les fetes comme le carnaval, ou quand ils trouvent un filon d argent.) Donc entre tout ca, nous on prend la dynamite et l alcool…!! non c est une blague, on prend les feuilles de coca et les refrescos. Puis on va a la mine.
Et la, experience epatante, impressionnante et interessante (je dirais saisissante, eprouvante, et eclairante), on se retrouve projetees au 19e siecle ou debut du 20e siecle avec des conditions de travail horribles (ils travaillent 6h par jour et peuvent travailler plus s ils le veulent, sont payes au rendement, 10 boliviano=1 euro pour ramener en le poussant un vagon de pierre de 1.5 tonnes et ce 10 par jour pour un total de 100 boliviano par jour).
Rien n est automatise, tout est a la force des bras. Il ya  plusieurs classes de mineurs, les chefs et les 2e classes, ceux qui transportent les pierres, ceux qui s occupent de les faire remonter par un trou dans un espece de grand chaudron (il y a quand meme une machine qui les fait remonter), les perforateurs (ils font les trous pour mettre la dynamite). On descend de plusieurs niveaux (2 fois par 3 echelles tres etroites) et a chaque fois c est plus chaud, etouffant et il y a plus de poussiere… L air se rarifie (malgre les puits d air qui sont censes aerer la mine) et on est essouflee a remonter les echelles. Il y a meme des embuscades : des trous (si on tombe, on est mort), faut faire attention a la tete, et on patauge souvent dans l eau, mais on a les bottes!! A un moment, dernier passage, genre un peu de speleologie, on quasi rampe pour monter dans un mini tunnel pour arriver dans un trou, ou il y a un mec qui s occupe de la machine pour remonter les sacs de pierres. Il me donne un souvenir (pierre brillante de plomb et d argent). On redescend tant bien que mal… et pour cloturer la visite, on va voir El Tio : le dieu de la mine, qui protege les mineurs (une espece de statue decoree par feuilles de coca, serpentins du carnaval, qui fume des cigares, avec pleins de bouteilles d alcool etc). Le guide nous explique, que tous les vendredis, les mineurs se reunissent ici (genre une salle de pause) pour faire leurs offrandes et en profiter pour fumer, pour boire etc… On lui demande s il y a beaucoup d accidents dans la mine, il nous repond peu, environ 15 morts par an (sur 10 000, c est quand meme pas mal, et ca c est sans compter les blesses et les morts jeunes de la silicose pulmonaire ou d autres maladies, El Tio, il est pas tres efficace…!!). La mine, c est une tradition, c est de pere en fils, normalement c est a partir de 18 ans, mais la on voit un jeune de 15 ans qui a commence il y a 2 mois, et il nous dit que d autres jeunes de 11/12/13 ans peuvent y travailler comme « job d ete »… que generalement, ils arretent jeunes (et pour cause), et que s ils ont la chance (comme notre guide), de trouver un filon d argent, ils s arretent et changent de metier ( » le tourisme, c est le nouveau filon »), le doyen de la mine ayant 64 ans (45 ans de travail dur et epuisant!). On ressort de la mine. Puis on redescend de la montagne, se change et rentre a l agence. On poursuit notre visite de la ville.
Donc vous avez compris, c est pas Germinal, mais presque quand meme; La prevention c est zero, meme les masques des perforateurs sont pleins de poussiere a l interieur a la fin de la journee, la medecine du travail, ici, c est  » quand tu peux plus travailler a cause de la maladie repiratoire, tu prends ta retraite dans une ville a plus faible altitude, pour avoir plus  doxygene, Sucre, ou Cochabamba ». Perso, je pense pas que ce soit tres efficace une fois que les degats sont faits.
Non, la vraie difference avec nos mines du temps de Zola, c est la paye : Ils peuvent gagner entre 2000 et 3000 bolivianos par semaine, quand le salaire mensuel d un professeur est de 1500 bolivianos, et le salaire minimum (legal) est de 1000 bolivianos. Alors, bon faut bien mourir de quelque chose, et dans un pays ou l esperance de vie est de 67 ans, et ou la denutrition infantile, liee a la pauvrete, est la premiere cause de mortalite, peut-etre vaut il mieux mourir plus jeune, mais riche en ayant rapporte de l argent a sa famille… Vous me trouvez cynique ? j ai juste depasse le stade de l indignation. Et puis bon, si c est pour que le fils fasse la meme chose, je vois pas ou est l ascenseur social (enfin si, y a l ascenseur social dans la mine!).  Et je ne vous parle pas de la pollution qu occasionne le traitement du minerai pour obtenir de l argent pur, ni des degats de la dynamite…
Bref, les mines, c est la richesse de Potosi et de ses habitants, mais a quel prix ?